7.8.14

"Le Comte de Monte-Cristo" de Mahiro Maeda, 2004

Gankutsuou - Le Comte de Monte-Cristo
by Mahiro Maeda, Studio Gonzo, 2004.

N'étant pas tombée dans le chaudron de l'anime japonais quand j'étais toute petite, ce n'est pas un genre vers lequel je me tourne naturellement, sauf exception, comme par exemple quand le hasard me met sous le nez un coffret de DVD à l'allure avenante (traduisez dans un style graphique intéressant) et à un prix qui me fait penser que même si le film est nul, il vaudra tout de même plus cher que ce que j'y ai investi. C'est ainsi que j'ai rencontré Le Comte de Monte-Cristo de Mahiro Maeda.
Au dos du boîtier on lisait :
"Projet comptant parmi les plus ambitieux de l'histoire de la télévision japonaise, Gankutsuou (Le Roi de la Caverne) revisite avec flamboyance la légende du Comte de Monte-Cristo cher à Alexandre Dumas dans cette somptueuse adaptation futuriste imaginée par Mahiro Maeda (Animatrix - Seconde Renaissance, Last Exile). Plongez-vous aussi dans les abîmes de l'âme avec l'un des animés les plus ovationnés de l'histoire!"

Accroche accrocheuse s'il en est. A ce stade-là, ce qui me faisait encore hésiter, c'était mon peu d'envie de renouer avec l'oeuvre de Dumas, que j'ai adorée dans mon enfance, mais il y a un temps pour tout dans la vie. C'est l'expression "adaptation futuriste" qui a chassé mes dernières réticences, parce que quand on associe "adaptation futuriste" et "anime", on se dit qu'il y a de grandes chances pour que le résultat n'ait plus grand chose à voir avec l'oeuvre originale et que sous un titre connu on aura sûrement du nouveau.

Pourquoi faire une "version futuriste" d'un roman du XIXe siècle ? se demande-t-on. On en découvre la raison dans les documents qui accompagnent le film. A l'origine, Mahiro Maeda voulait adapter l'oeuvre d'Alfred Bester, The Stars my Destination (Terminus les étoiles) de 1956,  mais pour une question de droits, il s'est reporté sur le roman de Dumas dont l'intrigue est proche puisque Bester s'est lui-même inspiré de Dumas. Gankutsuou superpose en quelque sorte les personnages et les univers des deux oeuvres. Je ne me souviens pas suffisamment du roman de Dumas pour dire en quoi l'anime le respecte ou par quoi il s'en éloigne, et d'ailleurs peu importe car l'essentiel est là : l'histoire se tient et elle est bien racontée.

Gankutsuou est une oeuvre composite, une oeuvre post-moderne par excellence, aussi bien au point de vue littéraire qu'au point de vue graphique.

Ce que j'appelle post-modernisme c'est, en une phrase, "l'art de faire du neuf avec du vieux", une sorte de pot-bouille culturel où l'on met tout ce que l'on trouve, sans distinction de style, de provenance et d'époque. On ajoute une touche d'inspiration personnelle et voilà. Cela donne une oeuvre entre nouveauté et déjà vu, pas désagréable à déguster, surprenante, mais pas toujours très digeste, car là où le post-modernisme est roi, le "kitsch" est souvent premier ministre.

Gankutsuou, intègre un tas d'éléments disparates et arrive à en tirer un style. Visuellement, c'est très chargé, mais un vrai régal. L'idée de génie c'est l'utilisation aussi intelligente qu'originale de textures qui lui confèrent une sorte de cachet, d'aura, artistique.  Avoir réussi à intégrer autant de motifs différents sans briser l'unité tient même du prodige. Parfois cela évoque l'art nouveau, ou les Nabis, d'autres fois on pense à l'art psychédélique. L'oeuvre nous promène d'une émotion artistique à une autre, au gré des décors et des trames. C'est stimulant. Le dessin des personnages est dans un style manga sobre et beau, les décors sont fantastiques et la bande son est excellente.

Un anime flamboyant, comme l'annonçait la notice, et impressionnant de créativité et de poésie pure.

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